ANDROMAQUE

J’entends les miaulements lointains de mes congénères
transportés par les vents
transportés par les mers
nous qui étions unis dans l’errance
venez, venez en silence
et vous serez enfin chez vous
comme en cette maison
qui s’est faite pour vous accueillir

Aujourd’hui j’ai le cœur empli d’affection
demain j’aurai encore l’estomac comblé
dans la gueule un arrière-goût de jus de thon
dans les yeux la joie l’oisiveté

Voyez mes petits alignés comme des bien portants
ils font la queue pour venir embêter maman

Tu vois les genoux là-bas, c’est pour les câlins
tu vois ces visages aimants, c’est pour les bisous
tu vois les mains s’agitant, c’est pour les caresses

J’étais ombre parmi les ombres
lettre parmi les nombres
minette parmi les matous
j’avais les coussinets attachés
au poids du balancier
je survivais sans me soucier
de ma trajectoire

J’étais chatte parmi tant d’autres
gestante parmi les errantes
une ortie dans la grande faune
goutte parmi les fleuves
je passais inaperçue
jusqu’à ce que je fasse mes preuves
et qu’enfin l’on m’ai aperçu

Je suis Andromaque
Je suis Andromaque
Je me frotte dans les jambes
suivant chacun de vos mouvements

Je suis Andromaque
Je suis Andromaque
la douceur incarnée
partagée entre la paresse et les câlins

Je suis Andromaque
Je suis Andromaque
dont la tragédie a été déjouée
à la recherche d’un royaume pour l’éternité